Bedouins in Jordan – 2008
Bédouins de Jordanie
Le désert peut exercer une fascination par son appel vers l’infini, pour autant, son inhospitalité peut se révéler rédhibitoire. Photographier le désert en tant que tel m’a toujours semblé un acte vain, par contre, y être et mesurer sa propre fragilité me semble essentiel. Tenter de comprendre comment l’être humain se faufile, s’adapte et compose avec ce milieu pour survivre me semble aussi essentiel. Dans un travail antérieur, j’avais approché les moines du désert en Egypte. Réaliser un travail sur les hommes du désert en Jordanie, les bédouins, faisait un écho avec mes préoccupations.
Il y avait aussi une autre raison. Imprégné de culture musulmane égyptienne sédentaire, je savais que je pouvais trouver quelques clés de l’islam dans la culture bédouine de cette région. Lorsque l’on a été nourri de la culture paysanne du Nil, ces clés demeurent abstraites. Mes premiers contacts m’ont amené rapidement à la question : « Qu’est-ce que être bédouin aujourd’hui en Jordanie? »
La relation des bédouins avec l’eau et leurs territoires est très étroite. C’est une société entière construite sur les valeurs de nomades, à la recherche d’eau et de nourriture aussi bien pour l’homme que pour les bêtes.
Depuis environ deux décennies, la sécheresse et les contraintes économiques ont posé la plus grande menace à un mode pastoral de transhumance. Les pluies sont limités, les pâturages ne sont pas régénérés, et la valeur du produit (viande, lait, laines) est trop basse pour que l’activité pastorale soit viable. Seuls les propriétaires de grands troupeaux tirent quelque bénéfice de cette activité. Les autres sont obligés de vendre leur bétail et deviennent des pauvres ruraux ou urbains.
S’ajoute aux changements climatiques la bataille pour l’eau dans la région, les mauvais usages de l’eau et les décisions politiques (telles que canaliser l’eau des puits pour fournir les villes) rend la steppe de plus en plus désertique et de moins en moins capable d’abriter la vie, contribuant ainsi à stériliser la terre et à rendre les paysages désolés.
Le travail proposé ici a été mené sur plus d’un an (2007-2008) sur tout le territoire jordanien et avait pour but de montrer le rapport des bédouins avec leur environnement naturel mais également avec la modernité et leur sédentarisation souhaitée par les autorités.
BoJordan Bedouins
The desert can be fascinating; it could evoke infinity while its nakedness can be brutally forbidding. I always felt that photographing the desert was a useless exercise, but being there and becoming aware of my own vulnerability is almost a spiritual, and necessary experience. To attempt to understand how man can slip into that environment, adapt and then immerse into it to survive is also part of such an experience. In an earlier project, I have approached the monks in the Egyptian desert; to undertake a new approach with the Bedouins in the Jordanian desert seemed to bring me closer to my aspirations.
There was also another reason for me to go there. Being influenced by the Muslim Egyptian sedentary culture, I knew that I could find some keys of Islam through the Bedouins culture in that region. These keys were abstract as long as I was bathed into the Nile’s rural culture. My first contacts led me quickly to the question: “ What is it like to be a Bedouin today in Jordan?”
The Bedouins have a very close relationship with water and their land. It is an entire society built on nomads’ values, looking for water and food for their animals as well as for themselves. Since almost two decades, drought and economic constraints have seriously endangered the regular rhythm of pastoral migrations. The rains are getting scarcer, the pastures are not being regenerated and the price of their produce (meat, milk, wool) is too low to allow for a viable pastoral activity. Only the lucky owners of large herds can still earn their living from such activity, while the others have to sell their cattle and are forced into a life of poverty in a rural or urban region.
Furthermore, the effect of climate changes is made worse by the regional disputes over water, by the bad usage of the available water and by some political decisions (such as channeling wells’ water to the cities). All these factors put together contribute to a more deserted steppe, less capable of providing life shelters, thus resulting in a sterile land and desolate landscape.
The work presented here was undertaken over a period of more than a year (2007-2008) covering the Jordanian territory; it is meant to illustrate the relationship the Bedouins have with their natural environment, as well as with modernity and settlements as it is being enforced by authorities.
